Blanquer : une école qui se tient sage, épisode 3 : un ministre ultra-libéral

mercredi 27 janvier 2021
par  SUD Éduc

Paradoxal, un modus operandi bien macronien

Depuis l’annonce du premier confinement, le ministre fait sortie sur sortie dans les médias en racontant tout et son contraire, assurant par exemple un matin de mars 2020 qu’il ne sera pas question de fermer les écoles… avant d’être contredit le soir-même par son patron. Pas grave, le lendemain, il affirme sans ciller que tout est prêt. Le ton est donné, les personnels, pas dupes, ont compris depuis déjà longtemps à quel point la rhétorique du mensonge et de la manipulation des faits est devenue la signature de JMB. Il faut dire qu’il n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’il a déjà affirmé pendant les mouvements de contestation des E3C – une pièce de la réforme du bac – que 99,9% des enseignantes approuvaient sa réforme, et que pour lui seules des « minorités radicalisées antidémocratiques et antirépublicaines [étaient] responsables des perturbations », ce que précisément son syndicat maison Avenir Lycéen essaiera de relayer. Comment expliquer alors qu’au plus fort de la mobilisation contre les E3C on pouvait dénombrer nationalement des pourcentages de grévistes supérieurs à 0,1 % ? Peu importe, « calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose » (Francis Bacon)…

Qualifié « d’hyper recteur » quand il était à Créteil, JMB aime être partout, surtout dans les médias, sur tous les fronts, quitte à raconter en apparence n’importe quoi. Ainsi, en mai 2020, après deux mois et demi de confinement et de déconfiture pédagogique à distance, nous avons toutes et tous été confrontées à l’incertitude la plus totale quand notre ministre annonçait une reprise obligatoire, mais pas forcément, dans le respect des gestes barrières, mais enfin autant que possible, en accueillant tous les élèves mais avec pas plus de 15 par classe… Le protocole sanitaire annoncé à grands renforts médiatiques pour la reprise du 11 mai n’aura été dévoilé qu’une semaine avant, pendant les vacances scolaires dans le 63/03… Avant qu’il ne change le 14 mai ! De quoi préparer le plus sereinement possible la rentrée dans un contexte déjà anxiogène… Cafouillage révélateur d’amateurisme récurrent ou au contraire volonté de tester la capacité du corps enseignant à exécuter les consignes si changeantes soient-elles ? Certains enseignantes se sont épuisées physiquement et nerveusement dans leurs efforts à respecter scrupuleusement les ordres et contre ordres du ministère, quand d’autres se sentaient bien vulnérables et bien seules face à leur crainte d’être sur-exposées au virus. Ça c’était en mai. En juin le protocole changeait, mais c’est d’abord dans les médias qu’on l’apprenait. Mi-juin, le ministère affirmait dans sa lettre aux professeurs que « dans une nouvelle dynamique de rentrée, le ministre a engagé des négociations avec les organisations syndicales sur la préparation de la rentrée de septembre. » Sauf qu’aucune véritable concertation n’a eu lieu… Ainsi, en septembre tout était prêt, naturellement – il l’avait dit droit dans les yeux à Bourdin sur RMC – il avait passé l’été à travailler sur une reprise digne de ce nom… sans aucun aménagement de programme pour faire face aux lacunes évidemment laissées par un trimestre virtuel et soutenir les élèves fragilisées. Sans aucun moyen supplémentaire pour mettre en œuvre de véritables mesures de protections sanitaires. Mais Blanquer en avait la certitude, « il y a plus de risques à rester chez soi que d’aller à l’école » (sic)… Certitude bien commode pour ne rien faire et remettre tout le monde au travail, et faire comme si de rien n’était… Mais la rumeur court dans les médias, les français n’ont pas été raisonnables pendant les vacances. Dès septembre, la rentrée aidant, le nombre de contaminations augmente. Début novembre, alors que Macron venait de prononcer un nouveau confinement (du moins de nos loisirs et de notre vie sociale), JMB nous l’assurait : il n’y avait que très peu d’enfants atteints du COVID, « un chiffre maîtrisé si je puis dire », seulement 3 528 selon lui… Sauf qu’il s’était bien gardé de dire que la méthode de collecte de ces chiffres avait ses limites, et ne traduisait pas réellement la situation sanitaire dans les salles de classe : elle ne fonctionne que sur le recensement des déclarations des parents volontaires. Santé Publique France donnait alors, elle, un nombre dix fois supérieur de cas dans les tranches d’âges d’enfant scolarisés…

Alors quoi… Notre ministre serait un menteur, une machine à « bobards », pour reprendre ses propos à l’encontre des syndicats vent debout contre la loi de la « Confiance » en 2018 ? Ce ne serait pas le premier… Il ferait vraiment n’importe quoi en affirmant tout et son contraire, simplement parce qu’il serait trop pressé de passer sur toutes les antennes qui voudraient bien l’inviter ?
Pas seulement… Car plus on se renseigne sur Jean-Michel Blanquer, plus on se rend compte que sa façon de manager, de communiquer et de réformer ne doit rien au hasard. Non, JMB ne fait vraiment pas n’importe quoi. Il divise sciemment, il souffle le chaud et le froid et laisse les sous-fifres se débrouiller avec ses annonces, il ne communique qu’avec les médias car il nous méprise, il cherche à nous mettre au pas, n’hésitant pas à pratiquer une politique de répression à l’égard des enseignantes récalcitrantes. Il en va de même pour les élèves : on est encore hanté par l’image de ces lycéennes de Mante-la-Jolie qui en décembre 2018 avaient été mises à genoux, mains derrière la tête par une police dont la seule volonté était d’avoir « une classe qui se tient sage ». Et si le but de Blanquer, c’était d’avoir une école qui se tient sage, dans la droite ligne de l’idéologie réactionnaire qui dénonce le syndicalisme et le pédagogisme ? Et si JMB était à la fois réac et en même temps libéral, autoritaire, proche de l’extrême-droite, des milieux catholiques intégristes, menteur, manipulateur ?

C’est ce que nous allons vous raconter pendant les prochaines semaines.