Concours enseignants, où sont passés les candidats ?

vendredi 29 novembre 2019
par  SUD Éduc

L’édition 2020 des concours enseignants fait plus que confirmer le manque d’attractivité du métier. Le nombre d’inscrits au Capes recule de 7,8 %, tandis que la chute frôle les 20 % dans la voie professionnelle.

Cela commence à ressembler à une hémorragie. Année après année, le nombre d’inscrits aux concours enseignants tend à se réduire. Et les chiffres de la session 2020 sont particulièrement préoccupants.

Les candidats au Capes externe sont ainsi à peine plus de 30 000, soit 7,8 % de moins qu’il y a un an. Une chute encore plus marquée dans les disciplines régulièrement confrontées à une pénurie, telles les maths (– 16,8 %) et physique-chimie (– 9,8 %). « Peu nombreux, les jeunes formés dans ces disciplines ont bien d’autres possibilités d’embauche, plus rémunératrices », analyse Stéphane Crochet, secrétaire général du SE-UNSA. La baisse est forte également en allemand (– 17,4 %). « Avant de candidater, on se demande si on pourra encore, dans vingt ou trente ans, enseigner cette langue, aujourd’hui moins demandée par les élèves », poursuit le syndicaliste enseignant.
Une désaffection très marquée dans la voie professionnelle

L’agrégation perd 5 % de candidats. Et la désaffection est plus accentuée encore pour les concours des voies technologique (– 16,6 %) et professionnelle (– 19,7 %). Seul le premier degré présente une stabilité globale (– 1,1 %), qui cependant masque des situations tendues dans les académies d’Aix-Marseille, Créteil, Versailles ou Montpellier.

« La baisse du nombre de postes offerts au concours ces dernières années entraîne une baisse du nombre de candidats », déplore Stéphane Crochet. D’autres facteurs jouent aussi, comme l’obligation, depuis 2010, d’avoir un master pour entrer dans la profession ou bien la relative faiblesse de la rémunération, inférieure de 20 % à la moyenne de l’OCDE après quinze ans de carrière. Et puis, relève Jacques Ginestié, ex-directeur de l’Institut national supérieur du professorat et de l’éducation de Marseille, « la crise du bac et le suicide de la directrice de maternelle de Pantin ont eu un impact délétère sur l’ambiance générale ».

Comment revaloriser le métier d’enseignant

Ce manque chronique d’appétit pour le métier a une conséquence : dans les disciplines en tension, le rapport entre nombre de candidats et nombre de postes est devenu problématique. Avec un dilemme : ne pas pourvoir tous les postes ouverts au concours ou bien recruter de futurs professeurs qui n’obtiennent guère plus de 6/20 aux épreuves… « Le ministère choisit souvent la première option. Mais c’est jongler avec l’hypocrisie », dénonce Jacques Ginestié, qui dirige aujourd’hui un laboratoire de recherche en éducation. « Car il s’empresse de recruter des contractuels, en s’adressant y compris aux candidats qui ont échoué aux concours… »
S’interroger sur la pertinence même des concours

« Il faut s’interroger sur la pertinence même de ces concours, qui consistent à recruter des étudiants en référence à un profil type, alors qu’une diversification serait bénéfique », prolonge l’ancien recteur Alain Boissinot. « Surtout, du fait de leur mauvais rendement, l’Éducation nationale recrute toujours plus de contractuels (+ de 30 000 dans le second degré). Il y a là de facto une deuxième voie de recrutement et des personnels qu’il faudrait accompagner et former », plaide-t-il.

D’autres suggèrent de rémunérer davantage les enseignants dans les disciplines en tension. Ou encore de faire passer les concours du secondaire à l’échelle académique, comme ceux du primaire. Mais cela ne manquerait pas d’accroître les problèmes d’attractivité d’académies comme Créteil ou Versailles, déjà contraintes de proposer un second concours aux recalés des épreuves de professeur des écoles…

Pour enrayer la chute des vocations, le ministère propose désormais une « préprofessionnalisation », qui consiste à recruter dès la deuxième année de licence des étudiants envisageant de passer les concours et qui, intégrés aux équipes, sont progressivement amenés à enseigner.

Des assistants d’éducation dans le rôle de professeurs