Dictocratie, démocrature

mercredi 20 mars 2019
par  SUD Éduc

La dictocratie (ou démocrature) désigne un régime qui, sous l’apparence d’une démocratie, fonctionne en réalité comme une dictature. Une constitution est en place, des élections ont lieu régulièrement, la liberté d’expression est garantie dans les textes, cependant les élites en place manipulent ces institutions afin de conserver leurs privilèges. Cela peut être aussi le cas lorsqu’il existe une collusion entre les médias et le pouvoir en place.

Pour en savoir davantage, suivre le lien vers le site Idées Hautes

Source (Libération)

Les prévenus présentés lundi en comparution immédiate après la casse de samedi semblaient bien éloignés des « ultra-violents » qui se sont illustrés sur les Champs-Elysées.

Au tribunal, une « dichotomie » entre la télé et les dossiers

Chaque semaine, c’est le même rituel : après la marée humaine qui envahit les rues de la capitale, ce sont des visages qui se succèdent entre des vitres de verre au palais de justice de Paris. Aux comparutions immédiates, la manifestation n’est plus ce long et impersonnel serpent fluo, elle redevient des fragments de vie. « Je suis fier d’être français, entame avec emphase le procureur de la République ce lundi après-midi. Je suis fier que nous ayons le droit de manifester […] c’est la démocratie. Mais cela s’exerce dans les limites du raisonnable et de l’interdit. » D’après les images, elles ont dans les deux cas été franchies samedi lors de « l’acte XVIII » des gilets jaune : des heurts sur les Champs- Elysées, un kiosque à journaux en cendres, des boutiques pillées et la terrasse de la célèbre brasserie du Fouquet’s ravagée. Il s’agirait de l’action de « 1 500 ultra-violents », selon les mots du ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner. Des « gens qui veulent détruire la République et tout avec elle », a ajouté Emmanuel Macron.

A lire aussiGilets jaunes : l’exécutif montre ses muscles

Sauf que ceux qui défilent dans la chambre 23.4 présidée par Isabelle Prévost-Desprez n’ont pas vraiment l’étoffe d’ennemis de la République. Le tribunal est plutôt confronté à de jeunes hommes à la mine épuisée, souffrant de maux allant de la « crise existentielle » à la « crise d’angoisse » et tous jugés pour des délits bien loin des images de chaos. « Des gens ont pillé la plus belle avenue du monde le 16 mars à Paris. Lui s’est approprié le reliquat de ces pillages. Se servir, c’est cautionner », insiste le procureur. Lui, c’est Raphaël, 33 ans, un grand gaillard aux yeux clairs, arrêté samedi à 18 h 50, rue de la Boétie, avec dans une main un sac contenant un jogging Nike et une veste Morgan (avec antivols) et dans l’autre une boîte de chocolats. D’une voix tellement basse qu’elle se dissout presque, l’apiculteur, père de deux enfants, bredouille : « Je regrette. » Quatre mois d’emprisonnement ferme sans mandat de dépôt, demande l’accusation, refusant « une peine symbolique car ce serait trop facile ». Il sera condamné à trois mois d’emprisonnement avec sursis.

« Il y a une dichotomie terrible entre ce qu’on a vu à la télévision ce week-end et les dossiers présentés, souligne Me Sylvain Niel, avocat de plusieurs prévenus. Les individus violents sont excessivement bien organisés, se présentent en noir et se changent au coin de la rue pour être irrepérables. » Ils passent donc entre les mailles du filet.

Ici, il n’y a que Cyprien, étudiant de 19 ans en terminale section musicale, jugé pour des doigts d’honneur adressés aux policiers. Frêle silhouette dans un sweat bordeaux, il raconte s’être trompé de manifestation : il venait pour le climat, s’est retrouvé avec les gilets jaunes. Bref, « il savait pas trop ». Il résume une courte vie marquée par deux tentatives de suicide, des fugues, une instabilité psychiatrique. « Je regrette tous les gestes que j’ai faits », plaide-t-il. Le tribunal le condamne à six mois d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve (SME) pendant deux ans.

Clément, 23 ans, pull gris et dreadlocks, souffrant d’addiction au cannabis et à l’alcool, a quant à lui lancé une cannette de bière en direction des CRS. « Un coup de sang, justifie-t-il sans quitter le sol des yeux. J’ai lancé en cloche, même pas en visant ». « On n’est pas dans un petit jet amical », diagnostique le procureur qui requiert une sanction sévère : cinq mois d’emprisonnement ferme avec mandat de dépôt. Il demandera la même peine contre Vincent, ce « street medic » venu de Caen et arrêté avec des bouts de marbre et de bitume dans la poche. « Pour ma mère », « un souvenir », a-t-il justifié lors de sa garde à vue. Il écoute, sonné, la présidente prononcer : « Quatre mois d’emprisonnement avec mandat de dépôt. »

A l’heure où Libération bouclait ces pages, aucun prévenu n’avait été jugé pour les scènes médiatiques de saccage. D’après nos informations, plusieurs enquêtes ont été ouvertes par le parquet de Paris. Elles concernent notamment l’incendie d’une banque et du Fouquet’s ou encore le pillage de la boutique Hugo Boss et d’enseignes de joaillerie.

Dans une dictocratie, L’exécutif se charge de vendre les services publics à des entités privées qui, comme les multinationales, financent certains partis politiques, dont celui du Président.
Dans le 20 heures du 11 mars, France 2 a confirmé l’information de Marine Le Pen selon laquelle Bayer-Monsanto finance l’ALDE, allié du futur parti d’Emmanuel Macron au Parlement européen.

Le 7 mars dernier, sur l’antenne de RTL, Marine Le Pen avait assuré que les lobbies finançaient les partis du Parlement européen, en prenant l’exemple de Monsanto, et du groupe des libéraux, l’ALDE. « Les lobbies financent les partis politiques européens et ils financent l’ALDE, le parti d’Emmanuel Macron au Parlement européen. Le parti politique de l’Alliance des Libéraux et Démocrates pour l’Europe (ALDE) est financé par Bayer Monsanto », avait lancé la présidente du Rassemblement national. Dans son édition du 11 mars, le 20 heures de France 2 a également mené son enquête sur le sujet. Comme le rappelle le 20 heures, il est impossible pour une entreprise en France de financer les partis politiques. Au Parlement européen, en revanche, un tel procédé est autorisé.
L’ALDE financée par Microsoft, Google, Bayer…

Dans ce contexte, des conflits d’intérêt sont-ils possibles ? En novembre 2018, l’ALDE organisait un congrès à Madrid (Espagne). Un congrès en partie financé par de grandes entreprises telles que Microsoft, Google et même Bayer, le fabriquant du glyphosate depuis le rachat de Monsanto. D’après le Parlement européen, depuis les dernières élections en 2014, les entreprises ont ainsi donné plus de 425 000 euros à l’ALDE. France 2 précise que ces financements sont légaux jusqu’à 18 000 euros par an et par entreprise. « Ces financements sont pour eux une chance de plus d’influencer les politiques. Ça peut biaiser la démocratie », explique à France 2 Margarida Silva, chargée de campagne chez Corporate Europe Observatory.