Discipliner les pauvres à l’entreprise de soi

mardi 29 octobre 2019
par  SUD Éduc

Les résultats sont souvent anecdotiques, voire confirment des lieux communs.

L*’*attribution du prix d’économie de la Banque de Suède à un trio d’économistes (Duflo, Banerjee et Kremer) est l’occasion d’éclairer la forme néocoloniale de la majorité des travaux en économie du développement. Esther Duflo vante une approche non idéologique, pragmatique, faite d’expérimentations et d’essais, et dont les résultats sont scientifiques et univoques. L’approche se veut aussi empathique et bienveillante avec les pauvres du monde entier, loin des discours stigmatisants des politiques. Selon ses propres termes, cette démarche du chercheur s’apparenterait à celle d’un plombier, fondée sur l’expérience et l’expertise.

La méthode d’expérimentation aléatoire, s’inspirant des essais cliniques en médecine, s’appuie uniquement sur l’analyse des statistiques individuelles. Les causes du maintien dans la pauvreté sont recherchées dans les choix individuels des pauvres. Mais les résultats sont souvent anecdotiques, voire confirment des lieux communs. C’est ainsi qu’une expérimentation dans les écoles kényanes réalisée par Michael Kremer a permis de découvrir que l’attribution de manuels scolaires en anglais ne servait à rien… car les élèves ne savaient pas lire l’anglais ! Tout ceci ne serait pas bien grave si ces enquêtes ne coûtaient pas un « pognon de dingue » pour des résultats triviaux. Le coût moyen d’une expérimentation est de 2 millions de dollars.