Les échos de la semaine
par
Bolivie : Un coup d’État est encore possible
Evo Morales démissionnaire, contesté après une réélection à la présidence entachée de forts soupçons de fraude : un « coup d’État » masqué ? Les événements, qui se précipitent, pourraient alimenter l’hypothèse a posteriori. La Commission interaméricaine des droits de l’homme dénombre 23 morts depuis fin octobre, surtout des partisans de Morales, et la haute-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Michelle Bachelet, dénonce « l’usage inutile et disproportionné de la force par la police et l’armée ».
La population améridienne (dont Morales est issu) est la cible de représailles. Sur fond de violences se dessine désormais le risque d’une prise de pouvoir de facto, attisée par une extrême droite comparée au mouvement pro-Bolsonaro au Brésil. La présidente par intérim Jeanine Añez Chavez annonce des élections « très vite » et négocie la gouvernance avec le Parlement, acquis à Morales, mais s’empresse de nommer, Bible à la main, un gouvernement de droite dure. Et chaque jour qui passe alimente un chaos qui pourrait « justifier » un nouveau coup de force contre la Constitution. Après celui conduit par Morales en 2016, passant outre le référendum qui lui déniait le droit de se représenter à la présidence…
Justice : Sursis pour Vincenzo Vecchi
Ne surtout pas se reposer sur ses lauriers : le comité de soutien de Vincenzo Vecchi l’a bien compris. Après la remise en liberté du militant altermondialiste par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, le 15 novembre, le parquet a décidé de se pourvoir en cassation contre cette décision.
Les juges avaient estimé « irrégulier » le mandat d’arrêt européen émis à l’encontre du ressortissant italien. Une irrégularité dont le procureur français chargé de l’affaire s’est rendu responsable, notamment en raison de l’absence de notification à un avocat italien.
La défense se réorganise pour empêcher tout revirement dans cette affaire. Vincenzo Vecchi, lui, pourra profiter de sa liberté après trois mois de détention préventive.
ADP : Radio France orchestre le silence
Les parlementaires à l’origine de la demande de référendum sur la privatisation d’ADP voulaient passer à l’antenne (et payer de leur poche) des spots pour crever le mur du silence qui entoure cette initiative constitutionnelle. Mais Radio France refuse ! Sa présidente, Sibyle Veil, invoque l’article 37 de son cahier des charges (« Les messages publicitaires ne doivent contenir aucun élément de nature à choquer les convictions politiques des auditeurs »), a pourtant accepté les pubs appelant à investir dans la privatisation de la Française des jeux. Explication : Sibyle Veil est une camarade de promotion de Macron à l’ENA. Comme son mari, Sébastien Veil. Ce dernier était très engagé dans le groupe culture et médias de la campagne de Macron, et son oncle, Jean Veil, est l’avocat… d’ADP.
Féminicides : L’échec de la police et de la justice
Face aux violences conjugales, la réponse judiciaire est « défaillante », pointe un rapport de l’Inspection générale de la justice, rendu public le 17 novembre. Commandé par le ministère, cet état des lieux revient sur les 88 dossiers judiciaires d’homicides liés à des violences conjugales, commis en 2015 et 2016. Dans 41 % des cas, les victimes avaient signalé des violences antérieures aux forces de l’ordre. Mais seules 18 % des dépositions ont donné lieu à des mesures. Quant aux plaintes transmises au parquet, 80 % ont été classées sans suite. Ces dix dernières années, « près de 1 500 femmes ont péri, victimes de leur conjoint et parfois de nos propres défaillances », reconnaissait la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, lors d’un colloque le 15 novembre. Plus de 130 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint depuis le début de l’année.
Ouïghours : Le plan concentrationnaire chinois
« Soyez sans pitié », « cure idéologique », « raflez tous ceux qui doivent l’être »… Plus de 400 documents internes du régime chinois, publiés par le New York Times le 16 novembre, jettent une lumière froide sur le système de répression et d’internement mis en place dans la province du Xinjiang. Dans cette vaste région de l’ouest du pays, plus d’un million d’Ouïghours et d’autres minorités musulmanes sont actuellement détenus dans des camps qualifiés officiellement par Pékin de « centres de formation professionnelle ». Mais les documents publiés – directives, discours secrets de cadres du parti et du président Xi Jinping lui-même – font le récit d’un véritable projet concentrationnaire. Au prétexte de lutter contre « le terrorisme » et « le séparatisme », il s’agit bien « d’éliminer toute résistance » et velléité d’indépendance de la société ouïghoure, dans une province stratégique aux riches ressources naturelles.
Dans ce discours interne datant de 2014, Xi Jinping appelle ainsi à user de « tous les outils de la dictature ». De fait, dans les années qui suivent, des sommes astronomiques sont dépensées dans des outils de surveillance high-tech et dans la construction de camps où des centaines de milliers de personnes sont enfermées depuis 2017. Ces personnes auraient été contaminées par le « virus » de l’extrémisme et devraient suivre un traitement « avant que la maladie ne dégénère ». C’est en tout cas ce que les agents du parti doivent répondre aux étudiants de retour dans la province qui s’interrogeraient sur le sort de leur famille détenue, selon des directives internes.