Les « partenaires » se rebiffent

vendredi 19 juin 2020
par  SUD Éduc

Les deux mois de confinement ont profondément changé la donne sur les dossiers sociaux.

On prend les mêmes et on recommence ? Depuis la sortie du confinement, les leaders syndicaux sont convoqués un par un au ministère du Travail et à l’Élysée pour « un nouveau cycle de concertations ». Ils y sont allés avec une impression de déjà-vu : la valse des réunions s’ébranle à un rythme effréné et les décisions finissent par ne pas tenir compte de leurs revendications. Mais l’humeur ne semble plus être à ce type de danse. Le 11 juin, tous les « partenaires sociaux », jusqu’au président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, refusaient la diminution du niveau du chômage partiel, que prévoyait le gouvernement. « C’est insupportable », grondait même Laurent Berger, pour la CFDT, après avoir appris l’information dans la presse. Un changement d’ambiance qui a contraint le gouvernement à une spectaculaire volte-face en l’espace d’un week-end. Signe de l’improvisation et de la fébrilité du pouvoir, mais aussi d’une évolution du rapport de force. Le gouvernement a réussi à faire converger, contre lui, des acteurs aussi antagonistes que le Medef et la CGT.

D’autres dossiers chauds ont été ainsi bouleversés par le coronavirus, comme celui du durcissement des règles d’indemnisation chômage, entré en partie en vigueur en novembre et reporté pour le reste au mois de septembre. Il avait déjà scandalisé la totalité des syndicats de salariés, dans une indifférence quasi générale. Désormais, le Medef temporise et préfère attendre de connaître l’ampleur du choc sur le chômage pour demander le maintien, ou non, de cette mesure qui permettait de faire 4,5 milliards d’euros d’économies sur les allocations en deux ans.

Les deux mois de confinement ont également profondément changé la donne sur le dossier retraites. La chute des cotisations a creusé un trou de 26 milliards dans le régime, soit presque 3 fois ce que l’« âge pivot » devait permettre d’économiser. Dans ces conditions, la CFDT déclare forfait et le Medef se dérobe.

L’ordre des priorités a donc été brutalement revu, mais cela dessine une bataille non moins colossale, sur la manière de « payer la crise ». Il faudra « travailler plus », prévenait Emmanuel Macron le 14 juin. Mais il n’annonce toujours rien de significatif pour les 800 000 jeunes en fin d’études qui arriveront sur le marché du travail en septembre, les intérimaires qui ont vu le nombre de missions chuter de 54 % en deux mois et les 240 000 chômeurs en fin de droits qui n’ont plus d’allocation depuis le 1er juin. Tous ceux qui aimeraient pouvoir travailler tout court.