Lutter contre les LGBT Iphobies en milieu scolaire, une nécessité !!

4 pages de la fédération SUD éducation
samedi 1er septembre 2018
par  SUD Éduc

Les LGBTIphobies sont bien présentes dans les établissements scolaires. Si les élèves en sont les premier-es victimes d’après les rapports annuels de SOS Homophobie, cette question concerne aussi les personnels, soit parce qu’illes peuvent être les auteur-es de ces actes LGBTIphobes (dans 20 à 25% des cas), soit parce qu’illes en sont eux/elles mêmes victimes (dans 15 à 20% des cas).

SUD éducation est au côté des personnels LGBTI de l’Education Nationale, pour lutter contre toutes les formes de discrimination LGBTIphobe et hétérosexiste, et appelle à se mobiliser à l’occasion du 17 mai et des marches des fiertés, contre la haine, pour les droits LGBTI et l’épanouissement de tou-te-s !!
Sommaire

La question de la visibilité p.1
Les manifestations de LGBTIphobies directes et indirectes, Lexique p.2
Témoignages tirés du rapport 2017 de SOS Homophobie p.3
Réponses possibles face aux LGBTIphobies p.4

La question de la visibilité

Deux lesbiennes sur trois et un gay sur 2 disent être « invisibles » au travail, selon des enquêtes de l’Autre cercle.
Le cadre professionnel est souvent perçu comme anxiogène et peu sécurisant. La question de dire ou non que l’on est LGBTI se pose en permanence. Le coming out* est toujours renouvelé, à chaque nouveau collègue : l’hétéroxualité présumée pour chaque collègue libère de la nécessité de verbaliser le fait d’être hétéro, et oblige à verbaliser le fait d’être LGB si les personnes ne veulent pas passer pour ce qu’illes ne sont pas. De même l’assignation au genre d’état civil nie la transidentité et l’intersexuation, et oblige les trans et intersexes à faire leur coming out. Pour celle-eux qui taisent leur orientation sexuelle et/ou leur identité de genre, la crainte de l’outing* est toujours présente. Et même si la situation est connue, l’ambiance de travail et le degré d’acceptation peut changer avec l’arrivée d’un-e nouveau-elle collègue, supérieur-e hiérarchique.
Dans le premier degré, pour les gays qui veulent être visibles, la crainte de l’amalgame par les parents avec la pédophilie peut être un frein à la sortie du placard.
Le choix de cacher sa vie personnelle pour ne pas risquer des discriminations peut avoir pour conséquence d’être moins bien intégré-e dans l’établissement, d’être mis-e en retrait. L’invisibilité peut peser sur la sociabilité avec les collègues (la vie conjugale est souvent un sujet de conversation). Pour les personnels qui pensent côtoyer un-e collègue LGBTI sans qu’ille le dise ouvertement se pose toujours la question de lui en parler ou pas, de savoir si ce silence relève d’un choix ou d’une situation subie par peur des LGBTIphobies.
Pour les personnels trans, faire sa transition le plus vite possible et se conformer à l’injonction du « passing » (passer pour une personne cisgenre, c’est-à-dire une personne dont l’identité de genre correspond au genre assigné à la naissance) sont aussi des enjeux importants.
Les manifestations de LGBT Iphobies directes

Elles peuvent prendre de multiples formes : moqueries et blagues déplacées, ostracisation, harcèlement, insultes, outing, emploi délibéré du prénom et du genre d’état civil assignés à la naissance pour les personnes trans ayant commencé leur transition sociale.
Pour les AED, leur recrutement étant une des prérogatives de la direction, les personnes identifiées comme LGBTI peuvent être discriminées au moment de celui-ci ou du renouvellement du contrat.
Pour les lesbiennes qui ont entamé une procédure de PMA, les chef-fe-s d’établissement s’opposent parfois aux absences nécessaire à la procédure de PMA et la loi n’autorisant pas cette dernière en France, elle donne donc raison à la hiérarchie qui peut prendre cette décision.
Les manifestations de LGBTIphobies indirectes

Bien souvent la hiérarchie minimise les actes LGBTIphobes voire les couvre en n’entreprenant aucune démarche à l’encontre de l’agresseur-e. Des collègues peuvent ne pas témoigner ou ne pas réagir verbalement s’illes sont témoins de LGBTphobie.
Témoignages extraits du rapport 2017 de SOS Homophobie

Mamadou est professeur des écoles. Il croise un jour une de ses élèves de CM1 dans la rue qui le traite de « gros PD » et de « fils de pute ».
Cette élève a déjà fait de nombreux commentaires en classe sur l’homosexualité de son professeur et sur son couple. Mamadou ne sait pas comment réagir et si déposer une plainte est approprié.

Kamel est un professeur stagiaire de 41 ans. Il a été outé par son chef d’établissement qui ne cesse de le harceler. Ce dernier a même constitué un faux témoignage d’un élève homosexuel dénonçant des attouchements.
L’élève a depuis été exclu. Le chef d’établissement lui avait clairement signifié qu’il « ne v[oulait] pas de ce genre de personne » dans son établissement ou dans l’Éducation nationale.

Jeanne a déposé plainte contre un de ses collègues. Celui-ci a traité un élève de seconde de « PD » et de « coiffeuse ».
L’élève est soutenu et paraît solide. Le professeur insultant est depuis ostracisé.

Yvan subit depuis le début de l’année scolaire des moqueries et de nombreuses allusions transphobes de la part de l’un de ses professeurs : « Il me traite comme un
moins que rien, n’hésitant pas à se moquer de moi quand je lui pose une question pour participer au cours, ou même à ne pas me donner les feuilles d’exercices. »
Ce professeur est allé jusqu’à expliquer devant toute la classe que la « transgénérité » est « simplement un moment où un homme ou une femme s’est perdu-e car il-elle s’habillait d’une certaine manière ou vivait avec beaucoup de gens du sexe opposé » (sic).

Karine, professeure bisexuelle, a été outée auprès de son chef d’établissement par un parent d’élève. Ce dernier la soupçonnait d’avoir une relation avec sa fille et avait déposé une plainte en 2004 qui avait été, par la suite, déboutée. En 2014, elle subit un blâme et une nouvelle plainte de la chef adjointe de son établissement à cause d’une discussion avec une élève sur un réseau social. La plainte est déboutée.
Alors que l’affaire est portée au tribunal administratif afin de lever le blâme, elle découvre que le rectorat possède un dossier la concernant avec des pièces qui essaient de justifier un comportement pédophile.
Les réponses possibles face aux LGBT Iphobies

- intervenir dans la conversation, reprendre les blagues déplacées : il est essentiel de ne pas laisser une ambiance sexiste/LGBTIphobe s’installer sur le lieu de travail. S’identifier comme allié-e ou personne concernée est une marque de soutien psychologique importante pour un-e collègue LGBTI victime de discrimination.

- dans les conversations, visibiliser l’alternative homo/hétéro, faire comprendre à ses collègues que l’espace de parole est bienveillant sur les questions LGBTI, respecter le prénom choisi et le pronom adapté pour les femmes ou hommes trans

- prendre contact avec la section syndicale de votre établissement ou la permanence départementale

- prendre contact avec des associations comme SOS homophobie, les Enfant d’Arc en ciel, OUTrans, pour avoir une écoute extérieure et au fait du suivi de ces questions

- inscrire les faits au Registre Santé Sécurité au Travail : il a valeur juridique, l’employeur a obligation de répondre aux faits qui y sont consignés. Cela permet de consigner précisément actes, dates pour ensuite soulever les problèmes en CHS voire en CHSCT (qui peut être saisi directement par les salarié-e-s)

- rappeler le devoir de protection fonctionnelle de la part du MEN à l’égard de ses salarié-e-s : l’administration doit protéger ses agent-e-s contre les violences, injures, menaces dont illes peuvent être victimes au cours de leurs fonctions.
L’administration doit mettre en œuvre des mesures de prévention (intervenir auprès de l’agresseur-e par exemple), fournir une assistance juridique (remboursement d’une partie des frais, autorisations d’absence pour audiences), réparer le préjudice. La demande de protection fonctionnelle doit se faire de manière écrite au supérieur hiérarchique

- rappeler la loi :
¤ L’article 225-1 du Code Pénal fait entrer dans le champ des discriminations les critères d’orientation et d’identité de genre.
¤ L’article R 624-3 et s. sanctionne injures et diffamations non publiques liées à l’identité de genre et l’orientation sexuelle.
¤ L’article 132-77 du Code Pénal stipule que « dans les cas prévus par la loi, les peines encourues pour un crime ou un délit sont aggravées lorsque l’infraction est commise à raison de l’orientation ou identité de genre de la victime ».
¤ L’article 1132-1 du Code du travail précise que « aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, [...] en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation ou identité de genre, de son âge... ».

Lexique

Cisgenre : personne dont l’identité de genre personnelle correspond au genre assigné à la naissance

Coming out : annoncer son homosexualité/identité de genre publiquement, à ses proches, connaissances...

LGBTI : Lesbiennes, Gays, Bi-sexuel(le)s, Trans, Intersexué-e-s

LGBTIphobies : désigne l’aversion, le rejet et plus généralement, toute attitude hostile, de manière avouée ou non, envers les lesbiennes, gays, bi-es, trans et intersexes

Outing : révéler l’homosexualité/identité de genre d’une personne sans son accord

Passing : pour une personne trans, passer pour une personne cisgenre aux yeux des autres

Transgenre : personne dont l’identité de genre personnelle ne correspond pas au genre assigné à la naissance

Le 4 pages en PJ