Lycées français à l’étranger : un rapport propose de « geler » les frais de scolarité des familles

mardi 5 février 2019
par  SUD Éduc

Marie-Christine Corbier - MARIE-CHRISTINE CORBIER | Le 29/08/18 à 07H00
EXCLUSIF - Un rapport de la commission des Finances su Sénat épingle la gestion de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) et « l’absence de stratégie » de l’exécutif.

« On navigue à vue ", déplore le sénateur (centriste) Vincent Delahaye, à propos du réseau de l’enseignement français à l’étranger. Avec son collègue Rémi Féraud (socialiste), il publie ce mercredi un rapport très critique, dans le cadre de la commission des Finances du Sénat, sur l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Cet opérateur de l’Etat chapeaute les 492 établissements français à l’étranger qui scolarisent aujourd’hui 350.000 élèves, dans 137 pays.

Dans ce rapport que « Les Echos " se sont procuré, les deux sénateurs reviennent sur l’objectif d’Emmanuel Macron de « doubler le nombre d’élèves accueillis au sein du réseau scolaire français d’ici à 2025 ». Est-il possible à atteindre ?

Une vague de grèves et de contestations

Financièrement d’abord, le réseau de l’enseignement français à l’étranger repose sur deux piliers : les crédits publics, et les frais de scolarité acquittés par les parents d’élèves. La coupe budgétaire surprise de l’été 2017 - une annulation de crédits de 33 millions d’euros - avait déclenché une vague de grèves et de contestations dans tous les lycées français à l’étranger. Elle s’est traduite par des suppressions de postes d’enseignants et une hausse des frais de scolarité pour les familles : ils sont passés de 4.290 euros par élève en 2012 à 5.300 euros en moyenne, soit une augmentation de 25 % depuis 2012. Les familles contribuent aujourd’hui aux frais du système à hauteur de 60 %, les crédits de l’Etat ayant diminué de 14 % depuis 2012. Le rapport suggère de « geler la participation des familles » à son niveau actuel.
Moins d’enseignants détachés

Les économies budgétaires sont à trouver du côté de la masse salariale - qui s’est accrue de 12 % depuis 2012 dans un certain « manque de transparence " - et dont il faut, selon les sénateurs, « limiter la hausse ». Pour cela, les sénateurs suggèrent de « poursuivre le mouvement amorcé de réduction de la part des personnels détachés de l’Education nationale au profit des recrutés locaux ».

Sur le plan budgétaire, les sénateurs proposent aussi de partager les 204 millions d’euros de fonds de roulement cumulés par certains établissements - ceux qui sont en gestion directe. Ou encore de « mutualiser » certaines fonctions avec les ambassades.

Pour attirer davantage d’élèves vers les établissements français, encore faut-il aussi que le ministère de l’Education nationale « assouplisse " les règles d’homologation de ces établissements, la procédure actuelle étant jugée trop lourde.
« Aucune réelle stratégie "

Mais tout cela ne réglera pas le problème de fond : « On a l’impression d’une absence de stratégie et de pilotage budgétaire, et ceci depuis plusieurs années, regrette Vincent Delahaye. Il y a un travail de fond à faire. Les frais de scolarité varient beaucoup. Il y a des endroits où on peut avoir intérêt à (les) augmenter, alors que dans d’autres pays, ils peuvent être un problème bien supérieur. »

« L’absence de stratégie » est d’autant plus dommageable selon les auteurs, que la France y consacre 455 millions d’euros par an, sur les 3 milliards du budget de l’action extérieure de l’Etat. Le nombre d’élèves dans le réseau augmente chaque année de 2 % dans le monde, grâce aux élèves étrangers. Mais elle « ne répond pas à une stratégie particulière d’implantation », selon Rémi Féraud. « Aucune réelle stratégie ne s’est dessinée à la suite du discours du président de la République, indiquant quel pays ou quelle zone géographique doit devenir une priorité », affirme-t-il.

Dans leurs recommandations, les sénateurs plaident pour la mise en place d’une « cartographie prospective des besoins de l’enseignement du français à l’étranger pour tenir compte des besoins des expatriés, des priorités diplomatiques et mener une appréciation qualitative de la demande locale ".