Paye ou crève !Les urgences en état d’urgence : grève dans cinq grands hôpitaux parisiens
par
Moins de services publics, c’est surtout : Accès à des soins de qualité mais dans des établissements privés que l’on va rémunérer avec les impôts de ceux qui ne peuvent déjà plus se soigner correctement.
Afflux de malades, manque de moyens, temps d’attente jugé excessif par les patients, agressions du personnel soignant : les urgences des hôpitaux sont en crise. Un mouvement de grève commencé le mois dernier à l’hôpital Saint-Antoine commence à faire tache d’huile.
(Source Libération)
Les urgences en état d’urgence : grève dans cinq grands hôpitaux parisiens
Conditions de travail « insupportables ». Les urgences des hôpitaux de Paris sont dans une attente sociale forte : afflux de patients toujours plus nombreux, tensions du fait des embouteillages et du temps d’attente, et même agressions du personnel soignant comme à l’hôpital Saint-Antoine (Paris XIIe). « Il n’y a pas assez de médecins et de personnel pour accueillir tout le monde, donc les patients attendent parfois très longtemps et cela crée de la frustration », expliquait en mars une infirmière au Quotidien du médecin. Un mouvement de grève lancé dans cet établissement le mois dernier fait tache d’huile. Les urgences de quatre autres hôpitaux parisiens (Saint-Louis, Tenon, la Pitié-Salpêtrière et Lariboisière) ont rallié le mouvement depuis ce dimanche, à l’appel des syndicats CGT, Sud santé et FO.
Et des préavis courent ailleurs. « Des assemblées générales vont se tenir à partir de lundi dans tous les autres hôpitaux de l’AP-HP pour décider s’ils se joignent au mouvement de grève, indique Christophe Prudhomme, médecin urgentiste et délégué CGT. Au-delà des agressions subies, c’est l’attitude de la direction de l’hôpital qui a provoqué la colère des personnels de Saint-Antoine. Elle n’a pas jugé utile de soutenir psychologiquement et administrativement les agents victimes de violences. Après avoir été agressées, deux infirmières et une aide-soignante ont dû commander un Uber pour aller porter plainte au commissariat, sans que personne de la direction ne les accompagne. » Ce que reconnaît la direction de l’AP-HP. « Contrairement à l’attitude qui est recommandée, il est vrai qu’aucun membre de l’équipe de direction ne s’est rendu sur place […], concède-t-elle dans un mail à Libération. Nous avons reconnu lors d’une réunion avec l’équipe que, dans ce cas précis, une présence plus immédiate de la direction aurait été justifiée et les consignes ont été rappelées, et sont appliquées, dans l’ensemble de l’AP-HP. »
« Colère monstrueuse »
Face à la crise des urgences, les syndicats demandent la création de postes afin de mieux gérer l’afflux de patients, des actions pour sécuriser les locaux et le personnel, et une prime de 300 euros par mois pour tous les agents urgentistes.
Des revendications auxquelles Martin Hirsch, le directeur général de l’AP-HP, a répondu dans une lettre adressée aux syndicats Usap, CGT et SUD santé, que Libération a pu consulter. Il y affirme « la volonté de renforcer la sécurité de l’ensemble des sites pour éviter la reproduction d’agressions », grâce à des travaux de « restructuration » des locaux et des moyens pour « renforcer les équipes de surveillance ». Martin Hirsch admet aussi la nécessité « de mieux tenir compte de l’augmentation de l’activité […] en ajustant les effectifs à l’évolution du nombre de passages ». Mais il souligne la difficulté de recrutement et annonce dans l’immédiat la création de 45 nouveaux postes aux urgences. « Totalement insuffisant, répond Christophe Prudhomme : 45 postes pour les services des urgences des 25 hôpitaux de l’AP-HP, ça fait moins de 2 renforts par hôpital. Ce plan n’est pas à la hauteur des besoins. » Il fait observer que le nombre de patients aux urgences des hôpitaux a presque doublé en un peu plus de quinze ans, passant de 12 millions en 2002 à 22 millions en 2018 en France. « Il y a une colère monstrueuse chez les agents qui s’exprime aujourd’hui car des demandes formulées depuis longtemps restent sans réponse, notamment en matière salariale et d’emploi », affirme Christophe Prudhomme.
Des effectifs, il est aussi question dans un autre préavis de grève, déposé cette fois par tous les syndicats (CGT, CFDT, SUD, CGC, CFTC, FO, UNSA, SMPS) à partir du 18 avril, dans l’ensemble des hôpitaux et services de l’AP-HP. Tout le personnel est donc concerné par ce mouvement pour protester contre les fermetures de lits et de services. Selon Christophe Prudhomme, le plan du directeur général, Martin Hirsch, « prévoit la suppression de 1 000 emplois par an pendant les cinq prochaines années. Soit 5 000 postes en moins à terme », en contradiction avec la montée en charge de l’activité des hôpitaux, notamment les urgences. Dans une déclaration à l’AFP, la direction répond qu’elle va « proposer en début de semaine prochaine » une rencontre avec les organisations syndicales. Et qu’elle reste « très attentive au dialogue social et [aux] revendications » formulées.
Tonino Serafini