Sorry, We Missed You : « Arrêter d’acheter sur Amazon ne sera pas suffisant »

dimanche 20 octobre 2019
par  SUD Éduc

Avec Sorry We Missed You, Ken Loach porte son regard sur les travailleurs pauvres ubérisés. Il aborde ici ce problème, mais aussi la question climatique, le Brexit, son travail avec les acteurs et son plaisir à regarder certains matchs de football.

Ken Loach arrive face à son intervieweur détendu, souriant, avec cet air humble et malicieux de celui qui persiste à en remontrer à ceux qui organisent un monde toujours plus barbare. Né en 1936, le cinéaste britannique a déclaré vouloir ne plus tourner alors qu’il revient en très grande forme avec Sorry We Missed You. Son regard sur ses personnages, en l’occurrence une famille de Newcastle prise dans la tourmente du travail précaire, est inimitable. Rencontre avec un grand monsieur.

Ce film a pour objet l’ubérisation du travail. C’est-à-dire une activité toujours plus individualisée, qui annihile toute solidarité entre les travailleurs. Après Moi, Daniel Blake, Sorry We Missed You n’a rien d’un film d’encouragement des classes populaires, comme vous souhaitiez en faire il fut un temps. Qu’avez-vous voulu susciter ?

Ken Loach : Si j’en juge par les premières réactions du public, ce film suscite de la colère. Je crois que la colère est nécessaire pour commencer à s’opposer à ce qui se passe. C’est la base d’une réponse plus articulée, plus organisée. À vrai dire, les sentiments des spectateurs sont mêlés : il y a de la colère, de la tristesse et une aspiration à réclamer la sécurité du travail et la fin de l’exploitation, une aspiration à retrouver une dignité.