Une famille syrienne

samedi 25 août 2018
par  SUD Éduc

Critique du 15/08/2018 (télérama)

Par Cécile Mury

La guerre, d’un matin blême à un autre. A l’intérieur, les occupants tentent de poursuivre une demi-vie, otages de tout ce qui rôde, explose et mitraille au-dehors. Mais ils ont beau se terrer, le mal les rattrape, s’infiltre comme une poussière toxique…

Dans l’immeuble, quelque part dans une ville syrienne indéterminée, tout le monde a fui, sauf eux : une famille (trois générations) cohabite avec la bonne et un couple de voisins recueilli avec son bébé. Unité de temps et de lieu : on ne sortira presque jamais du huis clos de cet appartement, dont l’imposante bibliothèque, les buffets couverts de cadres et les canapés profonds sont les vestiges d’un monde mort. Un décor d’avant les bombes, les pillards et les snipers.

Dans ce cadre presque théâtral, l’attente perpétuelle, heurtée d’alertes affolantes, de brusques saccades, suggère l’angoisse, l’impuissance et la ­claustration. Il n’est pas nécessaire de montrer les ravages militaires d’un conflit pour bien l’évoquer. Le film nous en fait partager un aspect bien plus insupportable : un état de siège permanent, une distorsion intime du quotidien. Pour que cette violence s’incarne, il fallait de beaux personnages, ­déchirés entre la nécessité de fuir et le ­besoin de rester. De la mélancolie tendre et funèbre du grand-père, fantôme d’une autre époque, à l’énergie dure de sa belle-fille, tous sont inoubliables de présence et de vérité.